Bénir, maudire, médire

6 janvier 2018

Bénir, maudire, médire... Etrangement, nous savons peut-être plus spontanément définir ce que signifie maudire ou médire, qu’interpréter avec justesse la bénédiction  !

Maudire c’est souhaiter du mal à quelqu’un, le vouer à la malédiction éternelle. C’est sans doute une manière d’exprimer ainsi sa colère ou son impatience. Certes, cette réaction peut être parfois expliquée, pour autant, cela ne la justifie pas. Médire, c’est dire du mal de quelqu’un, répandre des propos malveillants qui peuvent atteindre la réputation d’une personne, lui faire du mal, voire la détruire. Il n’est pas rare de voir de personnes poussées au suicide à la suite de médisances qui ont détruit leur réputation et leur vie. Nous savons ce que peut être le pouvoir des mots, le mal que l’on peut faire rien qu’en répandant des rumeurs sur une personne, quand bien même ces propos seraient faux sur le fond. Cependant, lorsque nous disons du mal, assurément nous faisons du mal à autrui, mais nous nous aussi faisons du mal à nous-mêmes, à notre capacité à voir le bien. Nous ternissons notre cœur et notre capacité même à être heureux. Et finalement, maudire ou médire ne résoudra rien. C’est un acte de lâcheté, qui laisse au mal le dernier mot.

Or, si des mots peuvent faire du mal, à plus forte raison, ne peuvent-ils faire du bien  ? Nous en faisons simplement l’expérience : il est toujours plus agréable et apaisant d’entendre des paroles bienveillantes sur nous, que des propos désagréables qui suscitent la colère, un sentiment d’injustice ou la tristesse. Le sens littéral et étymologique de bénir - bene-dicere - c’est dire du bien. Bénir, c’est avant tout cela, dire du bien de quelqu’un. Cela suppose une certaine disposition du cœur, optimiste et généreuse, qui cherche ce qu’il y a de bien, même lorsque celui-ci semble fragile, pauvre, ténu. Bénir, c’est une attitude pleine d’espérance et de confiance qui s’enracine dans la bienveillance : voir le bien, et plus encore, le chercher inlassablement.

«  Bénissez Dieu  !  » chantons-nous régulièrement. Bénir Dieu, c’est une forme de prière, joyeuse, enthousiaste et confiante. Bénir Dieu, c’est dire du bien de Dieu, et ainsi lui exprimer notre amour, notre attente, notre espérance. Bénir Dieu, c’est un chant de victoire par lequel nous prenons comme point de départ, cette conviction que le mal ne peut avoir le dernier mot. «  Je bénira Dieu toujours et partout  » chante un psaume  ! Quelles que soient les situations, c’est prendre le parti de la victoire du bien sur le mal, de la vérité sur le mensonge, de la beauté sur la laideur.

Plus encore, nous implorons et recevons la bénédiction de Dieu : à la messe, sans doute, mais aussi en bien des occasions de notre vie quotidienne, familiale et professionnelle. Si nos mots peuvent faire mal, si nos mots, à plus forte raison, peuvent faire du bien, combien plus, et infiniment plus, lorsque nous recevons la bénédiction de Dieu, nous recevons de Dieu sa Parole de Dieu qui réalise ce qu’elle dit, qui fait le bien qu’elle proclame, qui consacre par son amour celui qu’elle touche. Ce qui est vrai pour les personnes, l’est aussi pour les objets ou les lieux. En effet, bénir un objet ou un lieu, c’est l’attacher à l’amour de Dieu, en faire plus qu’un souvenir de cet amour, mais un moyen – à notre portée, à notre mesure, selon nos besoins - de demeurer dans cet amour, de le garder proche de nous, d’en faire le moyen d’entretenir cet amour dans notre vie quotidienne.

Bénir, cela nous engage, c’est un acte responsable et courageux : chercher le bien en toute chose, répondre à ce bien en toute situation. Combien cela convient plus à un baptisé, disciple du Christ  !

abbé Bruno Gerthoux, curé de Robion et des Taillades