Comme des brebis sans berger

9 février 2019

Voyant la foule, le Seigneur Jésus est saisi de compassion, parce qu’ils étaient comme des brebis sans berger  ; il se mit alors à les enseigner longuement (cf. Mc 6, 34).

Ces foules courent et viennent à pied de toutes les villes et villages, mûes par leur souffrance, leur désarroi mais aussi par leur attente et leur espérance. Elles sont comme des brebis sans berger parce qu’elles n’ont rien ni personne pour les conduire, les orienter, combler leur attente, prendre soin d’elles. Dans cet état elles sont vulnérables : n’importe qui ou n’importe quoi risque de prendre sur elles le pouvoir, de les abuser, de les perdre, voire tuer leur corps ou leur âme.
Le Seigneur est saisi de compassion par ces foules, c’est-à-dire que l’amour qu’il éprouve le conduit à partager leur épreuve et leur souffrance, non seulement il voit cette souffrance mais aussi la perçoit, la ressent, la partage. C’est pour cela qu’il prend la parole et les enseigne longuement. Il ne leur donne pas un cours, mais par ses paroles il nourrit leur cœur et leur âme, afin de les affermir, leur redonner confiance et courage. Il ne s’adresse pas seulement à leur intelligence, mais aussi à leur cœur. Ce ne sont pas simplement des réponses qu’il leur donne, mais il leur faire prendre conscience qu’ils ont les moyens - et comment les utiliser -, de trouver eux-mêmes les réponses adaptées à leurs attentes.

Ces foules nous les voyons nous aussi. Ces foules qui sont comme des brebis sans berger : sans foi, sans espérance, sans amour. N’entendons-nous pas ces foules qui crient leur colère, leur souffrance, leur angoisse, parfois avec haine et violence  ? Et comment réagissons-nous  ? Au lieu de la compassion, bien souvent, nous nous lamentons : le monde est devenu fou, il a changé, c’était mieux avant, les gens sont devenus égoïstes (l’égoïste... c’est celui qui ne pense pas à moi  !), mauvais, individualistes. Ce faisant, nous agissons nous aussi comme des brebis sans berger, nous nous égarrons  !

Nous manquons peut-être de confiance ou d’audace pour «  enseigner longuement les foules  », parce que nous pensons qu’il faut être très intelligent et avoir beaucoup de connaissance pour cela. Or, cet enseignement consiste à toucher les cœurs, à leur apporter le Christ, leur faire connaître et aimer. Si nous n’avons pas le courage de le faire par nos paroles, peut-être pouvons-nous commencer par le faire par le témoignage de notre vie, déjà en faisant en sorte que nos cœurs ne soient pas sans berger  ! Nous pouvons commencer par prier pour ces foules, les conduire au Christ, à sa grâce, à son amour, par la prière. Ce faisant, loin de nous laisser aveugler par ce qui ne va pas, par le mal, par ce qu’il y a de négatif, nous laissons le Christ et sa grâce triompher dans notre cœur et dissiper les ombres de notre regard.

abbé Bruno Gerthoux, curé de Robion et des Taillades