Du réalisme et du bon-sens !

14 septembre 2019

Je regardais, la semaine dernière, une émission (un reportage qui se voulait objectif) évoquant des personnes qui, dans le monde entier, affirment que la terre n’est pas ronde, mais plate ! Ils sont organisés, ils développpent leurs arguments, ils apportent des preuves, ils sont convaincus. Le reportage se voulait objectif, mais dès le début, l’intention était de ridiculiser leur hypothèse. Au fond, nous pourrions nous laisser prendre, et nous aussi avoir un jugement méprisant sur ces affirmations. On pourrait aussi se laisser convaincre par les affirmations des tenants de la platitude de la planète !

Cela m’a fait réfléchir. Je le redis, j’aime la télévision, mais cela ne fait pas de moi pour autant, un spectateur passif voire une éponge. Il est nécessaire d’avoir du recul et de saisir toutes les occasions pour réfléchir et nous poser des questions.

Notre société s’est habituée à l’idéologie. Dans ce contexte, nous tentons de contraindre la réalité à nos idées, à nos vues, à nos conceptions. Les idéologies marxistes qui veulent réduire toute vie sociale à l’opposition riche/pauvre, patron/ouvrier, n’en est qu’un exemple. Dans ce cadre-là, il n’y a pas d’idée qui soit bonne ou mauvaise, puiqu’au bout du compte, le concept de vérité, de bien, de beau est évacué. Ce n’est pas un critère qui compte. Seule compte l’idée, la réprésentation, la conception que je me fais du monde et des autres. Dans cet esprit, toute contradiction est une manipulation, voire une preuve que j’ai raison ! Les partisans de la terre plate ne sont qu’un épiphénomène ! Notre société est pétrie de représentations idéologiques qui veulent contraindre la réalité : relations humaines, genre, mariage, filiation...

Pour les chrétiens, ce qui compte, c’est le réel, la réalité, le réalisme. La loi naturelle, c’est cela. Loin de contraindre la réalité à nos idées, il s’agit de laisser nos idées et représentations être éclairées, élevées, enrichies, corrigées par la réel, par la réalité. Cela demande une attention au réel, au monde, aux autres. Cela demande du temps, une vraie compassion, un désir d’aimer et d’être aimé. C’est une écologie en acte et en vérite.

Il y a quelques années j’ai lu un livre qui m’a beaucoup marqué : Retour au réel, du philosophe Gustave Thibon. Un livre simple, concis, abordable que je conseille à chacun. Pour Gustave Thibon, le modèle de l’homme sage, c’est le paysan. Le paysan, c’est celui qui travaille chaque jour, sans compter son temps, en sachant qu’au bout du compte, des intempéries ou des imprévus peuvent remettre en cause tout son travail. Le paysan est un homme humble et persévérant. Le paysan est un homme qui vit avec la nature, à son rythme, qui en dépend et qui l’aime. Le paysan sait se remettre à l’oeuvre, malgré les difficultés et les échecs. Il sait se remettre en cause. Le paysan est un homme de foi, d’espérance et de charité. Le paysan est le modèle du réaliste, qui sait se laisser transformer, élever par le réel, par la réalité. A la fois, tout dépend de son travail et de lui, et à la fois, il demeure humble. C’est cette attitude-là qui le conduit à la foi en Dieu, une foi pleine de confiance, une espérance persévérante, une charité pour tous.

Paysan ! Pour certains cela pourrait être quasiment une insulte ! Pour moi, c’est un titre de noblesse, un programme de vie, une manière de voir le monde et les autres !

abbé Bruno Gerthoux, curé de Robion et des Taillades